L'action de l'homme qui oblige l'En-Haut à moins dévoiler
Sa Toute-puissance, Sa lumière ("or hokhma") est désignée par le terme écran
de hirik : l'homme diminue l'intensité du dévoilement de l'Intelligence supérieure, de
la ligne gauche jusqu'au niveau qui lui permet de l'équilibrer avec sa foi, sa ligne
droite.
La juste proportion obtenue entre la foi et la connaissance s'appelle
l'équilibre spirituel, la ligne médiane. L'homme définit lui-même cet état qu'il
souhaite obtenir.
Dans ce cas, l'homme existe déjà comme élément spirituel car il y a
en lui une juste proportion de foi et de raison correspondant à la ligne médiane qui lui
permet de parvenir à la perfection.
Cette partie de connaissance, de dévoilement, de ligne gauche que
l'homme peut utiliser en fonction de l'intensité de sa foi, en fonction de sa ligne
droite, en plaçant sa foi au-dessus de sa raison au moyen de la ligne médiane vient
s'ajouter aux attributs spirituels qu'il a déjà acquis en phase de "katnout ".
Le niveau spirituel atteint s'appelle "Gadlout", Niveau de plénitude, niveau
haut.
Quand l'homme sera parvenu au niveau spirituel de plénitude, il se
trouvera, grâce à ses attributs, en état d'égalité par rapport au premier degré, le
plus bas de l'échelle spirituelle.
Comme nous l'avons déjà mentionné, tous les degrés de l'échelle
sont imbriqués l'un dans l'autre, ils sont mutuellement empreints de leurs attributs
respectifs. En parvenant au premier degré de plénitude, l'homme peut par conséquent
trouver en lui une partie du degré supérieur et selon le même principe progresser vers
le but de la création, pour parvenir à l'union totale avec le Créateur, au degré le
plus élevé.
La progression spirituelle consiste à ce que chaque homme, dès qu'il
décèle un accroissement du mal en lui, demande au Créateur de lui donner des forces
pour le maîtriser. Il reçoit des forces sous la forme d'une lumière spirituelle plus
intense jusqu'à ce qu'il atteigne le véritable niveau originel de son âme après
la réparation de tout son égoïsme devenu complètement empli de lumière.
Quand des pensées étrangères viennent à l'esprit de l'homme,
celui-ci considère qu'elles le gênent dans sa progression vers le spirituel car elles
l'affaiblissent, accaparent son intelligence et remplissent son cur de mesquins
désirs, il cesse de croire que la vraie vie est contenue dans la Torah.
Après avoir surmonté cet état malgré tout, il parvient à la
lumière supérieure qui l'aide à s'élever encore plus. Les pensées étrangères sont
un moyen pour l'homme de progresser.
Il n'est possible de surmonter les pensées parasites qu'avec l'aide du
Créateur car l'homme ne peut travailler sur lui-même que s'il y voit un avantage
personnel, quelle qu'en soit la forme.
Notre corps, notre cur, notre raison ne comprennent pas quel
avantage peut leur apporter l'altruisme aussi, dès que l'homme veut faire le moindre
geste altruiste, il n'a pas la force d'agir ni par la raison, ni par le cur, ni par
le corps. Il ne lui reste plus qu'une seule chose, demander de l'aide au Créateur. Il est
alors contraint de s'approcher du Créateur jusqu'à ce qu'il se fonde en Lui totalement.
L'homme n'a pas le droit de se plaindre de n'avoir pas été doté de
suffisamment d'intelligence, de force ou de courage à la naissance ou bien de ce qu'il
est dépourvu d'attributs que possèdent d'autres personnes car, s'il ne suit pas le bon
chemin, ce sont des attributs qui ne serviront à rien. Il est possible qu'il devienne un
grand savant, même un érudit en matière talmudique, s'il ne parvient pas à la relation
avec le Créateur, il ne remplira pas sa fonction à l'instar de nombreuses personnes.
L'essentiel est de parvenir au niveau de juste, car ce n'est qu'à ce moment que l'homme
peut utiliser toutes ses aptitudes à bon escient et ne pas dépenser en vain ses forces.
Au contraire même, les forces les plus infimes, les facultés qui lui sont données par
le Créateur, l'homme peut les mettre en valeur en les dédiant au but suprême.
Si l'homme connaît une période d'abattement spirituel, il est inutile
de le persuader de prendre courage, de lui dire des paroles pleines de sagesse, rien de ce
qu'il entendra ne l'aidera. Les récits de ce que d'autres ont pu endurer, ressentir,
leurs conseils, rien ne le relèvera car, tout simplement, il n'a plus la foi en quoi que
ce soit, encore moins en ce à quoi sont arrivés d'autres!
Si l'homme se souvient de ses dialogues intérieurs quand il était
dans une période de progression spirituelle, quand il était plein de vie et non
spirituellement mort comme au moment présent, s'il se souvient de ses aspirations, de ses
acquis spirituels, il pourra alors reprendre des forces. S'il se souvient qu'il avait la
foi, qu'il plaçait cette foi au-dessus de sa raison et s'il se concentre sur ses
souvenirs personnels, il pourra sortir de son état de mort spirituelle. L'homme doit
s'appuyer sur ses propres souvenirs, sa propre expérience, c'est la seule chose qui peut
l'aider à sortir de la torpeur spirituelle.
Le travail de l'homme qui s'est élevé à un certain degré spirituel
consiste à procéder à une sélection dans ses sensations de plaisir et à faire en
sorte que la partie de ces plaisirs qui ne peut pas être équilibrée par la foi soit
jetée au loin. En Cabale, cette partie de plaisir que l'homme reçoit pour faire le
délice de son Créateur aux fins de renforcer sa foi ne s'appelle pas autrement que
"nourriture". Si l'homme n'est pas en mesure de se contrôler et désire avaler
toute la nourriture, il est ce que la Cabale qualifie de "ivre" (d'un excédent
de plaisir), il perd tout et se retrouve sans rien, ce que la Cabale qualifie de
"pauvre".
Dans la vie, l'homme se voit expliquer ce qu'il a le droit et ce qu'il
n'a pas le droit de faire, et s'il n'applique pas les instructions, il reçoit une
punition. Si l'homme ne prévoit pas la douleur et la souffrance qui le menacent s'il
enfreint la loi, il enfreindra celle-ci si, bien entendu, il éprouve du plaisir à cette
enfreinte. Il sera ensuite puni pour qu'il sache qu'il ne faut pas agir ainsi à l'avenir.
Par exemple, il existe une loi qui interdit de voler de l'argent. Si un
homme aspire à l'argent et qu'il sait qu'il peut en voler, même s'il sait qu'il peut
être puni pour vol, il n'est pas en mesure d'évaluer toutes les souffrances dues à la
punition. Il décidera donc que le plaisir de posséder l'argent est bien plus grand que
les souffrances dues au châtiment. Quand il connaîtra les souffrances dues au
châtiment, il verra qu'elles sont bien plus grandes qu'il le supposait et bien plus
grandes que le plaisir procuré par le vol. Il observera alors la loi.
A sa libération, on lui dira que le châtiment sera bien plus grand
s'il recommence, car l'homme oublie les souffrances qu'il a endurées. Quand il voudra
voler à nouveau, il se rappellera que les souffrances seront bien plus élevées pour ce
second vol, le choix lui est ainsi offert de s'empêcher de voler ou non.
Cet exemple sommaire parmi d'autres de la vie quotidienne que le
lecteur pourra lui-même trouver dans son entourage montre que les souffrances conduisent
l'homme à emprunter un chemin que les désirs de son égoïsme lui auraient interdit de
choisir car il est bien plus facile de voler que de peiner pour gagner sa vie, plus facile
de se reposer que de penser et de travailler, il est plus agréable de prendre du plaisir
que de souffrir.
Si l'homme a choisi d'étudier la Torah et d'observer les
commandements, il doit savoir que ces initiatives sont créées pour son bien. Autrement
dit, il doit comprendre que son égoïsme est gagnant. Personne dans ce monde n'est
capable de s'engager dans un travail absolument altruiste, non rémunéré par de
l'argent, par des honneurs, par des plaisirs, par des promesses pour le futur.
L'homme est encore moins capable de travailler sans voir les
conséquences de son travail, ses résultats, sans surveiller ce qu'il produit, ce qu'il
donne à quelqu'un, ce que reçoit quelqu'un, sans voir pour qui il travaille, autrement
dit, encore moins capable de faire des efforts dans le vide. Naturellement, notre raison
et notre corps égoïstes opposent de la résistance à cet état de fait car ils ont
été créés par le Créateur pour se délecter.
Seules les souffrances perçues par l'homme dans son environnement,
induites par la perte complète du goût et du plus petit infime plaisir qu'elle peut
procurer, par la totale conviction qu'il n'est pas en état de tirer de plaisir de quoi
que ce soit (sous n'importe quelle forme: tranquillité, joies, etc.), obligent l'homme à
désirer et à agir avec altruisme dans l'espoir de trouver son salut en empruntant ce
nouveau chemin.
Bien qu'il ne s'agisse pas d'altruisme car le but de ses actes réside
dans son bien-être et son salut, l'homme s'est néanmoins rapproché de l'altruisme
auquel il viendra progressivement sous l'action de la lumière contenue dans ses actes.
En agissant avec altruisme pour soi-même, en donnant pour recevoir,
l'homme commence à percevoir la lumière dissimulée dans ses actes, le plaisir, et cette
lumière est de nature à réparer l'homme.
Dans la nature, nous pouvons observer la chose suivante: des pluies
torrentielles se déversent sur la terre mais pas dans les endroits où il faut, par
exemple au lieu des champs, dans le désert, ce qui sera parfaitement inutile; par contre
de petites précipitations par endroits permettront des récoltes de fruits abondantes.
Pour reprendre cette image, l'homme peut étudier la Torah sans s'arrêter, ne jamais voir
les fruits de son étude, c'est-à-dire la connaissance du Créateur, ou bien au
contraire, loin de faire autant d'efforts il fera une récolte extraordinaire en étudiant
juste ce qui est nécessaire au moyen de la Cabale.
Il en est de même avec l'étude de la Cabale, si elle est dédiée à
la recherche du Créateur et non à l'acquisition de connaissances, les bienfaits
vivifiants de la Torah se déverseront là où il faut car ils ont été donnés à cette
fin. Si l'homme étudie pour accumuler des connaissances ou bien, ce qui est encore pire,
pour montrer son intelligence et s'en enorgueillir, même la Cabale ne donnera aucun
fruit, elle pourra seulement montrer à l'homme le but à se fixer pour étudier, celui-ci
fera ensuite des efforts personnels pour continuer.
L'homme qui étudie la Cabale concentre en permanence sa pensée car
l'ensemble de son travail consiste justement à imposer une bonne orientation à ses
pensées et à ses actes pour qu'ils forment un seul et même tout avec le but suprême de
la création, d'autant plus qu'il n'existe pas de moyen plus fort pour se rapprocher du
spirituel que la Cabale.
"L'Egypte" dans la Torah est la personnification de l'empire
de notre égoïsme (c'est pourquoi "Mitsraïm" provient des mots "mits -ra
" - concentration du mal), "Amalek" est une tribu qui a combattu Israël
(des mots "isr-iashar "-droit et "el "-le Créateur, autrement dit
ceux qui veulent se tourner vers le Créateur), et la personnification de notre égoïsme
qui en aucun cas ne souhaite que nous lui échappions.
L'égoïsme se manifeste dans les sensations (il les assaille) de
l'homme qui souhaite sortir de l'exil qu'est son égoïsme "égyptien". Amalek
survient dès le début de son chemin.
C'est à certains élus que le Créateur fait ressentir un
accroissement de leur égoïsme et il leur donne le désir de Le connaître, Il envoie
Amalek à Israël pour que celui-ci éprouve le besoin de se rapprocher du Créateur et
non pas seulement celui de s'améliorer, par exemple de faire preuve tout simplement de
"bonté".
Ces élus commencent alors à éprouver de grandes difficultés pour
s'améliorer, leur désir d'étudier, d'une très grande force naguère, disparaît, leurs
corps s'alourdissent au moment d'accomplir le moindre geste.
La lutte avec le corps correspond en principe au fait que le corps (la
raison, notre "moi") souhaite comprendre qui est le Créateur, où aller et dans
quel but, et savoir si chacun de ses efforts sera récompensé. Ni notre raison, ni notre
corps ne fournissent sans fondement l'énergie et la motivation pour faire quoi que ce
soit, et c'est à juste titre car n'est-il pas stupide de faire quelque chose sans rien
savoir d'avance?
Il n'y a pas d'autre moyen de sortir de notre nature, pour pénétrer
dans l'anti-monde spirituel, que d'acquérir une autre raison et d'autres désirs
correspondant à cet anti-monde. Ceux-ci sont opposés aux nôtres, car tout ce que nous
connaissons, tout ce que nous ressentons, tout ce qui constitue le tableau de ce que nous
appelons notre monde, correspond à des notions dictées par notre raison et notre
cur égoïste.
Ce n'est qu'après les avoir transformés en leur contraire, après
avoir transformé la raison en foi et le prendre en donner, que nous pouvons pénétrer
les mondes spirituels.
Comme nous ne sommes dotés que des instruments avec lesquels nous
avons été créés, notre raison et notre égoïsme, notre raison étant au service de
notre égoïsme, ce n'est que de l'extérieur, que du Créateur, que nous pouvons recevoir
d'autres instruments pour notre raison et nos sens.
C'est pourquoi Il nous "attire" vers Lui tout en nous
montrant que nous ne sommes pas en mesure de nous refaire par nous-mêmes. Bon gré mal
gré, nous devons chercher le lien avec notre Créateur, c'est le gage de notre salut
spirituel.
L'homme ne doit pas demander au Créateur d'avoir la possibilité de Le
ressentir, d'assister à des miracles, ce qui lui permettrait de lutter contre son propre
moi, pour que cela lui donne des forces au lieu d'éprouver une foi aveugle en la grandeur
du spirituel. La Torah l'avertit par l'exemple suivant: aussitôt après la sortie
d'Egypte, Amalek assaille l'homme, et c'est seulement en levant les bras et en demandant
la force de la foi que Moshé en est vainqueur.
Notre progression spirituelle nous permet de recevoir en permanence une
part de raison supérieure allant grandissant à chaque degré gravi. Nous devons sans
cesse accroître la force de notre foi pour qu'elle soit supérieure à notre raison sinon
nous retombons sous l'emprise de notre égoïsme, et il en est ainsi tant que nous ne nous
faisons pas un seul et même tout avec le Créateur.
C'est alors que nous parvenons à la connaissance absolue, à la
perception maximale de la lumière (or hokhma ) sans gradation aucune, ainsi qu'il est dit
dans la Torah "que la lumière soit et la lumière fut" ou bien comme le formule
la Cabale "au commencement de la création, tout n'était que lumière". Cela
signifie que lorsque la lumière brille pour tous sans distinction de niveau, tout est
absolument clair, il n'y a ni commencement, ni fin, aucune nuance, tout est parfaitement
compréhensible.
Il y a le chemin de la Torah et la Torah elle-même. Le chemin de la
Torah est une période difficile, un changement radical de l'approche de la vie, une
recherche de soi, de sa nature, une définition précise de l'orientation à donner à ses
désirs, une perception juste de la motivation à l'origine des actions, des efforts faits
pour surmonter les désirs du corps et les exigences de la raison, une parfaite conscience
de son égoïsme, une longue période de souffrances dans la recherche de l'assouvissement
des désirs, de déception devant l'impossibilité de trouver une "substance pour
remplir" ses aspirations, la conscience que la véritable fuite pour s'éloigner de
la source des souffrances, de l'égoïsme, réside dans l'altruisme des pensées, une
sensation de douceur à la pensée du Créateur au point de ne plus désirer que penser à
Lui.
Ce n'est qu'après avoir traversé toutes ces périodes préliminaires
de développement spirituel qui correspondent au chemin de la Torah, que l'homme comprend
la Torah, cette lumière supérieure qui brille pour lui de plus en plus à mesure de sa
progression sur les degrés de l'échelle spirituelle qui le mènent à l'union totale
avec le Créateur.
Notre chemin est composé de deux parties: le chemin de la Torah et la
Torah proprement dite. Le chemin de la Torah correspond à la période de la préparation
de nouvelles pensées et de nouveaux désirs au cours de laquelle l'homme éprouve des
souffrances. Après ce passage, après ce couloir qui mène au Créateur, l'homme
pénètre les mondes spirituels, le royaume de la lumière, il atteint le but de la
création, la Torah, il ressent totalement le Créateur.
Par génération du déluge, on entend la période de travail qui se
fait dans le cur, par "génération des bâtisseurs de la tour de Babel",
celle du travail effectué au moyen de la raison.
Nous désirons tous éprouver du plaisir depuis le premier instant de
notre vie jusqu'au dernier. La différence entre chacun de nous réside en fait dans la
forme sous laquelle l'homme désire éprouver le plaisir, celui-ci étant spirituel dans
son essence même. Ce n'est que notre écorce externe qui nous donne l'illusion de sa
matérialité.
Nous aspirons inconsciemment à changer l'écorce externe (le
vêtement) de notre plaisir en espérant le ressentir dans la lumière pure du Créateur.
Les écorces du plaisir auquel aspirent les hommes étant différentes, nous leur
attribuons des dénominations différentes. Certaines formes de plaisir sont considérées
comme normales, acceptables, par exemple, l'amour pour les enfants, la nourriture, la
chaleur, etc., certaines ne sont pas acceptées par la société, par exemple la drogue,
et obligent le plus souvent l'homme à cacher qu'il s'y adonne.
L'humanité tout entière accepte tacitement l'utilisation de son
égoïsme sans gêne aucune dans les limites conventionnelles. Il est à noter que les
limites de l'utilisation par chacun de son égoïsme et la mode des meilleures écorces
changent à mesure que la société se développe. Et chacun de nous, en fonction de son
âge, c'est-à-dire sous l'action "naturelle" du Créateur change ses écorces
qui correspondent aux moyens pour lui de satisfaire ses besoins en plaisir.
La mue, le changement d'écorce est parfois visible chez un individu.
Par exemple, une petite fille a du plaisir à jouer avec sa poupée, mais elle n'aimera
pas s'occuper d'un vrai bébé; sa mère, elle, n'éprouvera aucun plaisir à jouer à la
poupée, elle pourra cependant convaincre sa fille d'aimer s'occuper d'un bébé.
La petite fille pense, pour autant que sa compréhension du monde
pourrait le lui permettre, qu'il n'est pas facile pour sa mère de s'occuper de son
enfant, qu'elle n'en retire aucun plaisir.
On comprend le raisonnement de l'enfant car elle n'est pas encore à
l'âge où elle peut trouver du plaisir dans de vrais objets, mais elle le trouve dans des
jouets, autrement dit dans le factice.
Nous aspirons tous au plaisir que nous donne le Créateur. Nous ne
pouvons que Le désirer et percevoir la vie à travers notre désir. Nous ne sommes pas
différents en cela de nos âmes avant leur descente dans notre monde et leur incarnation,
non plus qu'après toutes leurs migrations une fois revenues au Créateur. Nous sommes
ainsi faits que nous aspirons au plaisir de recevoir la lumière qui émane de Lui, c'est
immuable. Tout ce qui nous est demandé, ce pour quoi nous a créés le Créateur, c'est
que nous changions l'écorce externe de nos plaisirs, que la poupée devienne un
véritable enfant et que nous en éprouvions du plaisir.
Comme un enfant pendant la tétée, l'homme souhaite, ne souhaite
recevoir que ce qu'il veut. Il accepte de faire des efforts s'il est sûr qu'au bout du
compte, il éprouvera du plaisir. Si l'homme souhaite travailler sur lui-même, en
étudiant la Torah, son corps aussitôt demande: pour quelle raison fais-tu cela?
Il peut être fait quatre réponses à ce discours:
- Pour agacer autrui, le plus mauvais but car il signifie aspirer à causer des
souffrances à autrui.
- Pour devenir un grand érudit, avoir des fonctions importantes, les honneurs, de
l'argent, faire un mariage réussi, ce but est meilleur que le précédent car des gens
peuvent en bénéficier, c'est ce cas de figure qui correspond au travail pour les autres
car ceux-ci le payent.
- Pour que seul le Créateur ait connaissance de son étude et de son travail sur
lui-même, non pour que les hommes le sachent, non pour recevoir les honneurs des hommes
mais pour que le Créateur l'élève. Cela s'appelle travailler pour le Créateur car une
récompense est attendue du Créateur.
- Pour que les fruits du travail accompli soient dédiés au Créateur sans retour aucun.
L'égoïsme demande alors: quel profit vas-tu en tirer? L'homme n'a rien à répondre, il
va à l'encontre de sa raison et de ses sentiments, autrement dit, il est au-dessus de sa
raison et de ses sentiments (lemala mi daat ).
Le travail de l'homme consiste à écarter sa raison et ses sentiments
de la critique et de la vérification du degré où il se trouve pour faire confiance
totalement au Créateur et concentrer tous ses efforts pour que ses pensées et ses
sentiments soient en permanence orientés vers le Créateur et la grandeur spirituelle. En
réponse à toutes les sollicitations de la voix de sa raison avec les arguments que
celle-ci avance sur la nécessité de s'occuper de toutes sortes de problèmes de la vie
quotidienne, l'homme accomplit tout ce qui lui est demandé mais toutes ses pensées et
tous ses désirs sont orientés vers le bien du Créateur. Cet homme ne désire pas
entendre les critiques de sa voix intérieure. Il est comme suspendu en l'air sans point
d'appui raisonnable, cette situation s'appelle être au-dessus de sa raison et de ses
sentiments "lemala mi daat ".
Plus l'homme éprouve de plaisir à posséder quelque chose, plus ce
quelque chose lui est cher, et plus ce quelque chose lui est cher, plus grande est la peur
de le perdre.
Comment l'homme peut-il parvenir à la prise de conscience et au
sentiment de l'importance du spirituel s'il ne les a jamais éprouvés? Il peut y arriver
en faisant des efforts justement pendant ses moments de vide spirituel, quand il
s'inquiète de n'éprouver aucune émotion vis à vis de la magnificence spirituelle,
d'être très éloigné du Créateur, de ne pas pouvoir changer.
Les efforts que fait l'homme dans ce cas, efforts appelés travail
quotidien, font naître en lui l'impression d'essentiel liée aux sensations spirituelles,
ce qui correspond au shabbat , période où il n'a pas besoin (où le cinquième des Dix
Commandements le lui interdit) de travailler sur lui-même, mais où il doit seulement
observer (leshabat ) pour ne pas perdre ce cadeau du Créateur.
On sait que si l'homme est personnellement impliqué dans quelque
chose, il ne peut plus en juger objectivement, quoi qu'il arrive. C'est pourquoi si on dit
franchement à un homme qu'il ne se conduit pas bien, il ne sera jamais d'accord car cela
lui est plus facile que de le reconnaître, et parce qu'il est sûr qu'il agit bien.
Si l'homme s'engage donc à agir comme il lui est demandé, il
découvre peu à peu que la VÉrité n'est pas dans ses actes et ses pensées passées
mais dans ce qui lui est conseillé. Ce principe est désigné dans la Torah par la phrase
"naassé ve nishma ".
Le but du Créateur étant de procurer du plaisir aux créations
(telles que nous sommes, toutes les autres n'ont été créées par Lui que dans un but
auxiliaire), tant que l'homme ne ressent pas la perfection dans la délectation et peut
trouver en elle une insuffisance (en qualité, en intensité, dans sa durée, etc.), cela
signifie qu'il n'a pas atteint le but de la création.
Pour se délecter, se conformer au but de la création, il faut
auparavant réparer le désir d'éprouver du plaisir, et ceci parce que le Créateur le
souhaite. L'homme ne doit pas se concentrer sur la recherche du plaisir. Dès qu'il aura
effectué sa réparation, il aura immédiatement la sensation de celui-ci, il doit
simplement procéder à sa réparation.
Cette situation est pareille à l'homme qui souhaite acheter un
appartement. Il ne doit pas penser à la manière dont il va emménager, mais comment il
va le payer, comment il va gagner l'argent car c'est uniquement quand il aura l'argent
qu'il pourra acheter l'appartement. Tous les efforts doivent donc être faits dans le but
d'obtenir de l'argent et non un appartement.
Il en est de même pour la connaissance des mondes spirituels. Tous les
efforts doivent être concentrés sur la création des conditions pour recevoir la
lumière, et non pas pour bénéficier de la lumière elle-même, autrement dit pour
créer des pensées et des désirs altruistes. C'est alors que le plaisir spirituel se
fera sentir.
L'humanité est constamment dans l'erreur et n'en tire guère de
leçons. L'accumulation des souffrances se fait néanmoins dans l'âme universelle et non
dans les corps périssables, ceci est un aspect positif du progrès qu'elle connaît.
Par conséquent, aucune souffrance ne disparaît. Au cours d'une
migration ultérieure dans ce monde, elle amène le corps humain à créer les conditions
pour chercher un moyen de se débarrasser des souffrances en s'élevant spirituellement.
Par rapport à nous, les mondes spirituels peuvent être à juste titre
nommés anti-mondes car dans notre monde toutes les lois de la nature sont construites sur
l'égoïsme, l'aspiration à saisir et à comprendre. Les mondes spirituels, eux, se
caractérisent par leur altruisme absolu, par l'aspiration à donner et àcroire.
Ces deux pôles sont tellement opposés qu'il n'y a aucune similitude
entre les deux et que toutes nos tentatives de se représenter ce qui s'y passe ne nous en
donnera aucune idée, la plus petite soit-elle. Ce n'est qu'en transformant les désirs de
nos curs, le "prendre" en "donner" et celui de
"comprendre" en "croire" au mépris de l'intelligence, que nous
pourrons ressentir les mondes spirituels.
Ces deux désirs sont liés, bien que le désir de saisir se trouve
dans le cur et que le désir de comprendre dans le cerveau. Ils ont tous deux
l'égoïsme pour base.
Il est dit en Cabale que la naissance d'un élément spirituel se fait
dans l'ordre suivant: "le p?re fait sortir la mère" pour mettre au monde un
fils: la perfection "fait sortir" la raison hors de son analyse du monde
environnant pour la remplacer par une nouvelle, spirituelle, indépendante des désirs et,
par conséquent, authentiquement objective.
La foi en le Créateur est simplement insuffisante. Mais ce n'est pas
tout, notre foi doit être dédiée au Créateur et non à notre propre bien- être.
N'est digne du nom de prière que la demande formulée au Créateur
dans le but de susciter en Lui le désir d'aider celui qui prie à ressentir la grandeur
et la magnificence du Créateur. Ce n'est qu'à l'appel de ce désir que réagit le
Créateur en élevant l'homme dans les mondes spirituels et en lui dévoilant toute Sa
grandeur; c'est alors que des forces sont données à l'homme pour l'élever au-dessus de
sa nature.
Une fois rempli de la lumière du Créateur qui donne la force de
s'opposer à sa nature égoïste, l'homme a la sensation qu'il est parvenu à l'éternité
car rien ne peut plus changer en lui et jamais il ne revient à l'égoïsme, il vit hors
de la dimension du temps dans le monde spirituel. Il y a équilibre dans perception du
présent et du futur, l'homme a le sentiment d'être parvenu à l'éternité.
Notre Créateur est absolument immuable, et nous, ses créations,
aspirons à la sérénité, à recevoir ce que nous désirons. Le Créateur a créé deux
forces pour notre développement: l'une qui nous fait reculer, autrement dit les
souffrances qui nous obligent à fuir notre état, une deuxième qui nous attire, qui nous
fait aller de l'avant vers le plaisir. Ces deux forces simultanément, pas séparément,
peuvent nous faire bouger, nous obliger à agir.
En aucun cas l'homme ne doit se plaindre que le Créateur l'a créé
paresseux, qu'Il l'a doté d'une nature qui fait qu'il lui est difficile de bouger. Au
contraire, un paresseux n'aspire pas sans raison et de manière impulsive aux petites
choses de la vie, il évalue longuement les situations, se demande s'il faut faire des
efforts pour obtenir ce qui l'attire.
L'homme ne fuit pas immédiatement les souffrances, il évalue pour
quelle raison et dans quel but il souffre, il en tire des leçons pour éviter que, dans
le futur, elles l'obligent à agir et à bouger, ce qui lui est pénible.
L'homme aimerait utiliser son égoïsme dans toutes les circonstances
de la vie, son entourage ne le lui permet pas. Toutes nos lois sociales sont construites
aux fins de trouver un terrain d'entente mutuel permettant l'utilisation de l'égoïsme de
chacun en portant le moins de préjudice à autrui. Dans tous les cas de figure, nous
souhaitons toujours tirer le maximum: le vendeur aimerait être payé sans remettre la
marchandise pour autant, l'acheteur aimerait avoir la marchandise gratuitement. Les
patrons rêvent d'employer de la main d'uvre à titre gracieux, les employés
voudraient percevoir un salaire sans travailler.
Nos désirs peuvent se mesurer à l'intensité des souffrances dues à
l'absence de ce que nous souhaitons: plus grande est la souffrance provoquée par le
manque de l'objet souhaité, plus grand est par conséquent le désir de le posséder.
Il est dit que "C'est le désir du Créateur de vivre dans les
créatures d'En-bas", créer ces conditions est le but de la création et notre
rôle.
L'idolâtrie ("avoda zara") est une inclination à suivre les
désirs égoïstes du corps, à l'opposé du travail spirituel, "avodat haShem",
"avodat haKodesh", qui correspond à la poursuite de désirs ou d'objectifs
altruistes.
L'union spirituelle consiste à comparer les attributs de deux
éléments spirituels.
L'amour spirituel signifie la recherche de l'union complète. Comme il
s'agit de l'union de deux attributs opposés, de l'homme et du Créateur, pour contrôler
s'il s'agit d'amour ou de soumission, l'homme doit se demander s'il a en lui le désir de
revenir à l'emprise de ses désirs. Cette question est naturellement le signe qu'il aime
véritablement le Créateur.
Si les attributs sont en harmonie, cela témoigne de la joie du
Créateur d'être uni à la création, et l'homme éprouve de la joie à donner au
Créateur.
Le retour "teshouva" signifie que l'homme dans ce monde et au
cours de son existence reviendra au degré spirituel auquel se situait son âme au moment
de sa création (l'état du premier homme avant le péché originel).
Il y a deux organes qui permettent d'agir, deux principes d'action en
l'homme, l'intelligence et le cur, la pensée et le désir. L'homme doit travailler
à transformer leurs principes égoïstes pour les faire devenir altruistes.
Nous ressentons tous nos plaisirs dans le cur. Si l'homme sent
qu'il peut rejeter tout plaisir terrestre et si un plaisir lui est réservé à lui
personnellement, il mérite de se délecter véritablement car, dans ce cas, il n'utilise
plus son égoïsme.
L'intelligence n'éprouve pas de plaisir à comprendre ce qu'elle fait.
Si l'homme peut réaliser quelque chose sans comprendre, et avoir la foi pour lutter
contre ce que lui dicte sa raison, il avance alors en plaçant sa foi au-dessus de sa
raison. Cela signifie qu'il a éliminé son égoïsme et peut agir selon la raison du
Créateur, non selon sa propre intelligence.
La lumière du Créateur pénètre l'ensemble de la création et
notamment notre monde bien que nous ne la percevions aucunement. Cette lumière est
nommée lumière qui anime la création. Grâce à cette lumière, la création, les
mondes existent sinon, la vie s'arrêterait, et aussi la matière dont ils sont
constitués. Cette lumière transparaît dans l'action de toutes sortes d'éléments
matériels et des phénomènes de notre monde.
Tout ce qui nous entoure et nous-mêmes ne sommes rien d'autre que la
lumière du Créateur. Elle est présente dans la Torah, dans la matière et dans la
créature la plus grossière. La différence n'est perceptible que de nous qui ne voyons
que les écorces externes, le vêtement de la lumière. En fait, une force agit dans
toutes les créations, la lumière du Créateur.
La plupart des hommes n'ont la perception que du vêtement externe de
la lumière du Créateur. Il y a des hommes qui ne ressentent la lumière du Créateur que
dans la Torah. Il y a des hommes qui ressentent la lumière du Créateur dans tout ce qui
les entoure, qui ont le sentiment que tout est lumière émanant du Créateur et
emplissant le moindre espace.
Le Créateur a décidé de créer l'homme dans notre monde pour que des
profondeurs de son état originel, il puisse s'élever spirituellement jusqu'au niveau du
Créateur, devenir identique au Créateur. Le Créateur a par conséquent créé
l'égoïsme, le désir de se délecter. Cette sensation d'égoïsme est appelée la
création originelle.
Le Créateur étant lumière, naturellement, la création originelle
fut emplie de lumière-délectation.
Cela signifie qu'au commencement de la création, la
lumière-délectation emplissait l'espace- égoïsme créé, elle l'emplissait
complètement jusqu'à satiété.