Connaissance des Mondes Spirituels
Chapitre 3

Rav Michael Laitman

Traduction : Nelly Baron

 


Celui qui prend conscience et ressent la magnificence du Créateur n'a donc pas d'autres sensations que la joie à la moindre occasion de faire quelque de chose de plaisant pour Lui, et ce qui était ressenti auparavant comme de l'esclavage se transforme en fait en liberté totalement empreinte de plaisir.

Si l'homme sent des obstacles dans sa progression spirituelle et doit faire des efforts surnaturels dans ses tentatives pour progresser spirituellement, cela signifie qu'à ses yeux, c'est-à-dire dans ses sensations, le Créateur n'est pas revêtu de grandeur, mais qu'il s'est mis à poursuivre progressivement d'autres buts. En se tournant vers d'autres buts, il ne reçoit aucun appui du Créateur, car il s'en éloigne encore plus.

Dans le processus d'aspiration vers le Créateur, l'homme ne reçoit pas immédiatement un soutien moral de Lui. S'il ressentait aussitôt l'inspiration et le plaisir lié à ses efforts, son égoïsme, bien entendu, se réjouirait de cet état, et l'homme continuerait ses efforts dans le but de recevoir du plaisir. Il n'aurait plus alors aucune possibilité de sortir du cadre de sa nature égoïste et d'atteindre à l'altruisme pur, car il aurait vu que le travail spirituel sur soi-même comporte des plaisirs bien plus grands que tout autre chose.

Si l'homme s'adonne à une activité quelconque, il commence progressivement à acquérir une finesse particulière dans la perception des éléments sur lesquels il travaille. C'est pourquoi il n'existe rien dans ce monde que l'homme ne puisse commencer à percevoir grâce à ses habitudes même si, au début, il est privé de toute perception affinée de ces éléments.

La différence entre le Créateur et nous réside dans la perception ou la compréhension des choses : nous nous percevons nous-mêmes et nous percevons les objets séparément, il y a celui qui perçoit, et il y a l'objet perçu, celui qui comprend, et ce qui est compris.

Pour percevoir quoi que ce soit, il faut un certain contact entre celui qui perçoit et l'objet de la perception, quelque chose qui les lie, quelque chose de commun pendant le processus de perception. L'homme comprend tout ce qui l'entoure uniquement au moyen de ses sensations, et ce qu'il ressent est compris par lui comme une information authentique et fiable.

Partant de cette condition qu'il n'existe rien dans la création outre le Créateur et Ses créations, on peut dire que le tableau et les sensations perçus par chacun de nous sont la manifestation du Créateur à notre conscience et, à chaque degré d'élévation spirituelle, ce tableau est de plus en plus authentique jusqu'à ce qu'au degré suprême d'élévation, l'homme ait accès à la connaissance du Créateur. C'est pourquoi tous les mondes, tout ce que nous percevons en dehors de nous, n'existent que par rapport à nous, êtres dotés de telle ou telle capacité de percevoir.

Si un homme ne ressent pas le Créateur et Sa toute-puissance, c'est comme s'il était dans les ténèbres. Bien qu'il se trouve dans les ténèbres, il ne peut pour autant pas affirmer que le soleil n'existe pas dans la nature car ses sensations sont subjectives, il ne perçoit le monde qui l'entoure que par rapport à lui-même.

Si l'homme prend conscience que le fait de nier le Créateur et Sa toute-puissance est une impression totalement subjective et changeante, par un effort de volonté avec l'aide de livres et de maîtres, même à partir de ce degré il peut commencer à s'élever et à s'apercevoir que ces ténèbres sont spécialement créées pour lui par le Créateur, pour qu'il ait besoin de Son aide et soit obligé de se rapprocher de Lui.

Ces conditions sont spécialement créées par le Créateur pour celui qui veut se rapprocher de Lui. Il faut savoir que c'est justement en s'élevant au-dessus des ténèbres que l'homme procure de la joie à son Créateur car plus les ténèbres d'où s'élève l'homme sont épaisses, plus il peut avoir conscience de la grandeur du Créateur et dûment évaluer son nouveau degré spirituel.

En ayant une sensation de ténèbres, de dissimulation de la toute-puissance du Créateur et d'absence de foi en Lui, il ne reste plus rien d'autre à l'homme que de faire un effort de volonté et d'essayer à l'aide d'un livre, d'un maître, de chercher un chemin pour sortir de cet état, jusqu'à ce qu'il perçoive un faible rayon de lumière, autrement dit jusqu'à ce qu'il ressente le Créateur et puisse, en se renforçant par des pensées constamment dirigées vers le Créateur, s'extraire de l'ombre pour s'élever vers la lumière.

Si l'homme prend conscience que cette sensation de ténèbres est nécessaire pour sa progression et, par conséquent, souhaitable, qu'elle est envoyée par le Créateur, il se réjouit de cet état, de ce que le Créateur a créé en lui ces sensations d'ombre, autrement dit de ténèbres incomplètes dans lesquelles il a encore la possibilité d'apercevoir une source de lumière.

Si l'homme n'utilise pas cette possibilité et n'essaie pas d'aller vers la lumière, le Créateur se cache totalement à lui, les ténèbres les plus noires l'envahissent, il éprouve une sensation de totale absence du Créateur et de sa toute-puissance, et il n'est plus en état même de se représenter comment il avait pu vivre auparavant dans des buts spirituels au mépris de la réalité et sa raison. Cette sensation de ténèbres totales continue tant que le Créateur ne l'éclaire pas d'un petit rayon de lumière.

Les désirs de l'homme sont appelés "récipients" dans lesquels il peut recevoir la lumière supérieure ou plaisir. Ces désirs doivent être, de par leur nature, semblables aux attributs de la lumière divine, dans le cas contraire, la lumière ne peut pas les pénétrer selon le principe de concordance des éléments spirituels: l'approche ou l'éloignement ou l'imprégnation mutuelle et l'union ne se produisent que selon la loi de la similitude des attributs. C'est pourquoi l'homme pourra purifier son cœur de l'égoïsme dans la même mesure que son cœur se remplira de la perception du Créateur, selon la loi de la concordance des attributs de la lumière et du récipient.

Quel que soit le degré où se trouve l'homme, il peut commencer à s'élever s'il a à l'esprit que parmi tous les états possibles qui peuvent être créés pour lui par le Créateur, des plus élevés aux plus bas, le Créateur a choisi justement celui du moment présent comme le meilleur pour sa progression spirituelle future.

Autrement dit, il ne peut pas y avoir pour l'homme de degré meilleur et plus utile pour lui que cet disposition d'esprit, cette humeur et ces circonstances extérieures dans lesquels il se trouve sur le moment, même s'ils lui paraissent les plus décadents et les plus désespérés.

En prenant conscience de cela, l'homme se réjouit et reçoit la possibilité de se tourner vers le Créateur pour Lui demander de l'aide et Le remercier tout en se trouvant dans l'état le plus bas et le plus désespéré.

Porte le nom de spirituel ce qui est immuable, ne disparaît pas de la création même quand le but est atteint. L'égoïsme quant à lui, autrement dit, tous les désirs originels de l'homme, porte le nom de matière puisqu'il disparaît quand est opérée une réparation.

L'existence d'un "lieu" spirituel n'est pas lié à un espace quelconque, il dépend des attributs de l'élément spirituel. C'est pourquoi tous ceux qui parviennent à un certain degré par l'amélioration de leurs attributs spirituels voient (ressentent, perçoivent) la même chose.

La Torah est constituée de 70 degrés (personnages). A chacun de ces degrés, elle est perçue de manière différente, selon les attributs de chacun des degrés. C'est pourquoi, l'homme qui a acquis les attributs d'un degré découvre la Torah et le Créateur sous un nouvel angle.

Tous ceux qui sont parvenus à l'un des 70 degrés de chacun des mondes spirituels voient ce que voient tous ceux qui se trouvent au niveau de ce même degré (chivim panim le Torah).

C'est pourquoi on peut comprendre que lorsque les sages écrivent: "Abraham a dit à Isaac", ils se trouvent tout simplement au même niveau où se trouvait Abraham et ils comprennent ce que Abraham doit dire à Isaac car ils se situent eux-mêmes au même degré qu'Abraham.

Tous les commentaires de la Torah sont écrits de la même façon, chacun avec son niveau de connaissance. Chacun des 70 niveaux correspond à quelque chose qui existe objectivement, tous ceux qui le comprennent voient une seule et même chose, comme tous ceux qui vivent dans ce monde et tous ceux qui se trouvent dans un lieu donné voient un seul et même tableau qui les entoure.

DÈs que l'homme éprouve le plus petit désir altruiste, il entreprend un chemin jalonné d'envols et de chutes spirituels: ou bien il est prêt à se fondre complètement dans le Créateur, ou bien il est dépourvu de pensées spirituelles et, d'une manière générale, toute pensée d'élévation spirituelle lui échappe et lui semble tout à fait étrangère.

C'est comme une mère qui apprend à son enfant à marcher: elle le tient par la main, il sent son soutien et, tout à coup, elle se met en retrait et le lâche. L'enfant se sent alors complètement délaissé, bon gré mal gré, il doit faire un pas en avant en direction de sa mère, et c'est seulement ainsi qu'il pourra apprendre à se déplacer lui-même.

L'homme croit que le Créateur l'a délaissé, en fait, Il attend de lui qu'il marche tout seul.

La Lumière supérieure se caractérise par un calme absolu. Par calme dans les mondes spirituels, on sous-entend l'absence de modification des désirs.

Tous les actes et les mouvements dans les mondes spirituels (altruistes) et dans notre monde intérieur (d'égoïsme) aboutissent à la transformation d'un ancien désir en désir nouveau, et si celui-ci est resté inchangé, rien de nouveau ne s'est produit, il n'y a pas eu de mouvement.

Le désir peut être en permanence très fort, faire l'objet de tourments et ne pas laisser de répit à l'homme, s'il est constant dans sa force, cela signifie qu'il n'y a pas de mouvement.

Le calme absolu de la Lumière supérieure sous-entend le désir permanent, immuable du Créateur de nous réjouir. Cette lumière nous pénètre, mais comme ce point qui est en nous, que nous appelons notre "moi" est ancré dans l'écorce de notre égoïsme, nous ne nous réjouissons pas de la lumière dans laquelle nous "baignons".

L'erreur de la plupart des personnes qui adoptent un mode de vie religieux réside en ceci qu'elles étudient des lois de la Torah pour les connaître et les mettre en application comme but du don de la Torah, et le but de l'homme dans ce monde comme une condition de l'accomplissement de la volonté du Créateur et de la tâche impartie à l'homme dans ce monde. Le sens de "Torah li shema " n'étant pas correctement compris par elles, elles considèrent que l'étude et l'accomplissement des commandements sont suffisants pour observer cette condition de la Torah. Elles souhaitent être des "Bne Torah", mais du fait de leur interprétation inexacte de ce qu'attend d'elles le Créateur, elles restent au niveau de "baal baït ", comme leur maître.

Certains étudient la Torah pour la connaissance pure, ce qui est interdit par le commandement précis "barati etser ra, barati Torah tavlin ", "lo natnou mitsvot, ele letsaref ba hem Israel". Etudier "la Torah lo li shema " est une enfreinte car celui qui étudie accepte le don du Créateur à l'humanité, don fait uniquement pour que nous nous débarrassions de notre égoïsme, ce qui exclut d'en faire un moyen pour augmenter notre égoïsme.

La Torah révélée et la Torah voilée sont une seule et même chose, le dévoilement du Créateur aux créations. Tout dépend de l'intention que place l'homme dans son étude de la Torah et de ce qu'il désire en recevoir. S'il a pour but de connaître toutes les lois et leurs conséquences, tous les commentaires, les discussions et les modes d'énonciation des conclusions de nos sages, ce "ben Torah " ne parviendra pas au niveau spirituel le plus bas (voir chaar ahava , chp. 8).

Si l'intention de l'homme est de se rapprocher du Créateur, d'?tre comme un matériau conducteur lui permettant d'agir sur son égoïsme, alors la Torah se transforme pour lui en cette source de forces et d'actions pour lesquelles elle a été donnée, sans distinction entre révélée et secrète. Au moyen de la Cabale l'homme parvient plus rapidement et moins douloureusement au "li shema".

Le problème réside en ceci que celui qui étudie la Torah ne peut pas savoir quelle sont ses intentions. Bien qu'il étudie "lo li shema", son égoïsme et la société le maintiennent dans une sensation erronée de sincérité. La Torah "li shema" signifie que tous les désirs de l'homme concordent avec les désirs du Créateur, que l'homme est tout entier le conducteur mettant en oeuvre les actions du Créateur, mais notre égoïsme est tel qu'il peut démontrer à n'importe lequel d'entre nous qu'il est justement cet homme.

Celui qui aspire à "li shema" aspire à voir en tout les actions du Créateur, il contrôle en permanence son point de vue sur le monde: essaie-t-il bien de voir partout le Créateur et Lui uniquement, Sa force et Ses actions, se perçoit lui-même et autrui comme des créatures agissant en tant qu'entités indépendantes? Tout ce qui est attendu de l'homme est décrit dans le Talmud, mais, en principe, c'est passé sous silence ou bien abordé superficiellement au cours de l'étude.

La seule chose créée par le Créateur, c'est notre égoïsme, et si l'homme en annule l'action, il ressent le Créateur, et son égoïsme disparaît, tout comme au début de la création. C'est la définition de l'élévation (retour, techouva ) sur l'échelle de Jacob. Dans ce cas, l'homme est un composé unissant le corps physique et l'âme divine.

Le travail sur soi-même doit être effectué tant dans le sentiment de sa propre insignifiance par rapport au Créateur, que tant dans la fierté que l'homme est au centre de la Création (s'il remplit son rôle, sinon il est juste un animal). Il s'ensuit respectivement de ces états contradictoires deux prières au Créateur: la prière pour demander de l'aide et les remerciements pour les possibilités d'élévation spirituelle (au moyen de la mise en pratique des commandements dans l'intention "de se rapprocher du Créateur", qui sont appelés dans ce cas "halacha ", du mot halacha: mouvement).

Le principal moyen pour l'homme de progresser, c'est la prière adressée au Créateur pour qu'Il renforce son désir de s'élever spirituellement, pour qu'Il lui donne les forces nécessaires pour vaincre la crainte du futur et, s'il agit en ne se conformant pas aux lois de l'égoïsme, pour qu'Il renforce en lui la foi en la grandeur et en la force du Créateur, en Son Unité, et qu'Il lui donne également des forces pour étouffer en lui les élans permanents qui le poussent à agir selon sa propre raison.

Certains entreprennent d'approfondir leurs intentions "kavanot" pendant les prières, les demandes ou lors de l'accomplissement d'actes quelconques. Le Créateur n'entend pas ce qui est prononcé par les lèvres, Il lit nos sentiments dans le cœur de chacun. Cela ne vaut pas la peine de faire des efforts pour bien prononcer des phrases vides pour le cœur et des mots incompréhensibles, de lire dans les livres de prières cabalistiques des signes ou des "kavanot " incompréhensibles. La seule chose qu'il est demandé à l'homme c'est d'aspirer au Créateur, d'avoir pleine conscience de ses désirs et de demander au Créateur de les transformer, et ne jamais cesser le dialogue avec Lui.

Les lecteurs qui lisent l'hébreu ont la possibilité de se reporter aux sources indiquées ci-dessous et de comprendre comment la Torah nous indique les attributs de notre nature et les moyens de sa réparation.

Le principal dans le travail sur soi-même est de se sentir humble devant le Créateur. Une telle attitude ne doit pas être un artifice mais un but en soi. Si par le travail effectué sur lui-même, l'homme sent cette qualité pénétrer en lui progressivement, cela signifie qu'il avance correctement. (Talmud, Avoda Zara 20;2).

L'homme vient au monde rempli d'égoïsme absolu, cette qualité est tellement développée en lui qu'elle lui donne la certitude qu'il est un juste et qu'il est dénué d'égoïsme (Talmud, Haguiga 13;2).

La Torah, c'est la lumière du Créateur, et ce n'est que celui qui la reçoit qui peut prétendre étudier la Torah (Zohar, Metsora 53;2).

La lumière de la Torah est cachée et ne se dévoile qu'à ceux qui ont atteint le niveau de juste. (Talmud, Haguiga 12; 1).

Atteindre par l'étude à ce degré auquel l'homme ne souhaite rien d'autre à part s'élever spirituellement et recevoir le nécessaire pour maintenir son corps en vie et non pas pour en tirer un plaisir, c'est le degré par lequel se fait l'entrée dans les mondes spirituels (Talmud, Sota 5;1).

Il est interdit d'étudier la Torah pour tout autre but que l'élévation spirituelle (Talmud, Sanhédrin 60; 2).

Le plus haut degré pour l'homme est de parvenir à "maase merkava " (diriger), autrement dit effectuer une réparation telle qu'il lui est donné de pouvoir avoir une emprise sur le monde (Talmud, Souka 28;1).

La condition sine qua non de l'élévation est d'aspirer constamment à être en relation avec le Créateur (oreh haim 1;1), (Torah, Vaïkra 4;9), (RAMBAM, Ilhot Esoleï Torah, chap. 1), (Talmud, Souka 39;1).

Il ne faut pas désespérer en chemin, le Créateur nous assure du succès si nos aspirations sont correctement orientées (Talmud, Psahim 50;2), (Talmud, Berahot 35;2), (Talmud, Souka 52;2).

Le principal dans l'homme, ce sont ses aspirations et non ses réalisations car ces dernières sont déjà le résultat de son égoïsme (Talmud, Iavamot 104;2), (Talmud, Sota 25;1).

L'homme doit aspirer à avoir conscience de son insignifiance originelle autant qu'il doit être fier de son travail spirituel et de sa prédestination (Talmud, Taanit 25;1), (Talmud, Berakhot 6;2).

Celui qui aspire au Créateur s'appelle le fils du Créateur (Talmud, Chabath 66;2), à la différence de celui qui souhaite une récompense (honneur, connaissances, argent) pour son étude.

Connais le Créateur (Divreï aiamim 1; 28;9), (Talmud, Nedarim 32;1). La Cabale porte le nom d'enseignement secret (nistar) parce qu'elle n'est comprise que dans la mesure où l'homme se transforme. C'est pourquoi ce dont a connaissance un homme, il ne peut pas le transmettre à autrui, il ne peut que l'aider à faire le même chemin (Talmud, Haguiga 14;2), (RAMBAM, Ilhot Esodot Thora, chap. 4).

Qui peut s'imaginer le monde sans la présence du Créateur (Talmud, Ema 86;6), (Talmud, Chabath 77;2), (Talmud, Minhot 39;2).

L'homme doit s'imaginer qu'il est seul au monde avec le Créateur. Beaucoup des personnages et des sujets de la Torah représentent les attributs de l'homme, les phases de son chemin spirituel, désignées par des noms propres, signifiées par leurs actes et portant des dénominations géographiques. (Talmud, Sanhedrin 37;1), (Talmud, Kidushim 40;2).

L'homme ne doit pas désespérer quand, à mesure qu'il étudie et qu'il fait des efforts dans son travail sur lui-même et dans ses tentatives d'élévation spirituelle, il se voit plus mauvais qu'avant d'étudier la Cabale. Celui qui est supérieur aux autres découvre encore plus la véritable nature de son égoïsme, c'est pourquoi il se considère comme étant pire bien qu'il soit devenu meilleur (Talmud, Souka 52;2), (Talmud, Meguila 29;1).

Il ne faut pas prêter attention au fait que le monde entier est dans une course incessante aux plaisirs et que ceux qui aspirent au Créateur ne sont que quelques unités (Talmud, Rosh Ashana 30;1), (Talmud, Berahot 61;2).

Le principal dans la progression spirituelle, c'est la demande à l'aide adressée au Créateur (Talmud, Berahot 6;2), (Talmud, Taanit 11;2), (Talmud, Ioma 38;2).

Le principal attribut négatif témoignant de l'égoïsme c'est l'orgueil, l'aplomb. (Talmud, Sota 49;2).

L'homme doit recevoir des forces pour prendre conscience du but de la création, se réjouir d'avance de la réparation du monde et de l'arrivée de l'apaisement de l'humanité (Talmud, Chabath 118;2), (Talmud, Terouma 135;1) / 136;2).

La foi est le seul moyen de secours car l'homme se caractérise par son égoïsme qui peut l'induire en erreur, mais la foi est la seule base pour pénétrer dans l'espace spirituel (Talmud, Makot 24;1), (Talmud, Chabbath 105;2).

La foi ne peut se manifester chez un homme dénué du sentiment de crainte, et l'égoïsme s'incline seulement devant la crainte.(Talmud, Shabbath, 31; 2).

Même si un homme ne fait rien, son égoïsme le pousse à commettre des actes mauvais de diverses natures, c'est pourquoi celui qui ne pèche pas est celui qui fait le bien (TALMUD, Kidouchim 39;2), (Talmud, Baba metsi 32;2).

L'approche du Créateur ne se fait que selon la loi de la similitude des attributs (Talmud, Sota 5;1).

L'ouïe correspond à la "Foi" car si l'homme souhaite prendre l'entendu comme vérité, il doit y croire. La vue, quant à elle, correspond aux "Connaissances" car il n'y a pas besoin de croire ce qui est dit, il faut simplement voir de ses propres yeux. Tant que l'homme ne reçoit pas d'En-Haut l'altruisme au lieu de l'égoïsme, il ne peut pas voir car il percevra ce qu'il voit à travers le prisme de son égoïsme, et il lui sera encore plus difficile de sortir de cet égoïsme. C'est la raison pour laquelle au début il faut suivre son chemin à l'aveuglette, être au-dessus de ce que nous dicte notre égoïsme et ensuite, à l'intérieur de la foi, commencer à comprendre, à prendre conscience des connaissances spirituelles.

Pour transformer l'égoïsme en altruisme, la raison en foi, il faut avoir une juste représentation de la grandeur, de la majesté du spirituel en comparaison de l'existence matérielle, éphémère, prendre conscience que s'inquiéter, consacrer toute son existence à l'homme n'a pas de sens, autrement dit qu'il est tellement plus avantageux de servir le Créateur, plus agréable de faire quelque chose pour le Créateur que pour ce corps insignifiant, égoïste, qui de toute façon ne peut pas être rassasié, sa seule gratitude consistant à permettre à l'homme de ressentir un instant une sensation agréable.

Le monde non animé est parfait de par sa nature. Le fait qu'il n'a besoin de rien en est la démonstration. De la même manière, celui qui n'est pas animé spirituellement reçoit des forces pour être dépositaire de la Torah et exécuter les commandements car il a reçu l'éducation pour ce faire. Ses désirs ne sont pas différents de ses semblables, autrement dit, il ne souhaite pas et ne peut pas faire de mouvements spirituels personnels.

La nature spirituelle qui possède ces qualités est dite non animée car son mouvement est un mouvement d'ensemble. C'est, à propos, le meilleur gage de la conservation immuable de la tradition. La sensation de perfection qui est ressentie par la masse croyante provient de la lumière environnante qui brille au loin, "or makif ", et cette lumière lointaine brille pour eux bien qu'ils soient opposés de par leurs attributs au Créateur. Il n'y a pas d'autres voies pour l'homme que de commencer d'observer les commandements au niveau non animé, uniquement par sous forme de geste. Il est dit de ceux qui observent ainsi: "même ceux qui sont vides sont remplis des commandements comme la grenade". Mais le Créateur dit "J'ai créé l'égoïsme et j'ai en plus créé la Torah pour que sa lumière vous ramène à moi".

Comme la nature végétale croît sur le terreau de la nature non animée, le niveau spirituel végétal a besoin également du niveau non animé qui le précède.

L'homme qui souhaite continuer à croître, grandir spirituellement, avoir des mouvements spirituels personnels, indépendamment de l'opinion, des habitudes, de l'éducation sociale, qui souhaite en finir avec la dépendance qu'elle engendrent, refuse de se soumettre aveuglément à l'éducation (il réalise le "sof", appelé "malkout de elion ").

La décision d'en finir avec les automatismes gestuels est le prélude à l'apparition de l'embryon d'un nouvel état végétal spirituel (malkout de elion naassa keter le tahton ).

Mais comme la graine qui doit se désagréger dans la terre pour grandir, l'homme doit cesser complètement de ressentir toute vie spirituelle dans l'existence non animée des masses, au point qu'il ressente cette vie non animée comme une mort. Cette sensation correspond à sa prière.

Pour devenir "végétal" avec des mouvements spirituels personnels, il faut réaliser un travail sur soi-même, à commencer par le "labourage" de la terre non animée.

Il n'est possible de progresser spirituellement qu'en s'opposant au désir de d'éprouver une satisfaction personnelle. L'homme qui souhaite tendre vers le Créateur contrôle en permanence ses désirs et décide des plaisirs à prendre. Du fait que le Créateur souhaite le satisfaire, il doit accepter les plaisirs mais uniquement ceux qu'il peut accepter pour faire plaisir au Créateur.

Le langage de la Cabale le décrit: la force de la volonté (l'écran qui se trouve dans l'esprit, "pe de rosh") calcule, soupèse quelle quantité de plaisir accepter pour le Créateur, pour lui faire plaisir, dans la mesure précise de l'amour à l'égard du Créateur ("or hozer") et l'homme reçoit cette quantité ("or pnimi"). Mais par crainte de peiner le Créateur, il n'accepte pas la quantité de plaisir ("or makif ") ne correspondant pas à celle qui fera plaisir au Créateur.

Dans ce cas, tous les actes de l'homme sont guidés par l'aspiration de celui-ci à être agréable au Créateur, non pas par son aspiration à se rapprocher ou par crainte de s'éloigner, ceci étant également une aspiration égoïste, mais par amour désintéressé, par désir de faire plaisir ou par crainte de peiner.

Les véritables sentiments, la joie, la peine, le plaisir, la peur, etc., nous les ressentons dans notre corps tout entier, et non pas dans une de ses parties. C'est la raison pour laquelle l'homme qui souhaite contrôler ses désirs doit ressentir si tout son corps est en harmonie avec ce qu'il pense.

Par exemple quand il dit une prière: est-ce que toutes ses pensées, ses désirs, ses organes sont bien en harmonie avec ce que récitent ses lèvres; est-ce que tout se passe automatiquement ou ne prête-t-il pas d'attention à une partie de ce qu'il prononce parce ce qu'il ne souhaite pas percevoir le désaccord du corps et les sensations désagréables que cela implique; comprend-il quel avantage lui apporteront les demandes qu'il formule automatiquement en lisant son livre de prières?

Cela vaut la peine de demander à son cœur ce qu'il voudrait prononcer au cours de la prière. Une prière n'est pas ce que prononcent machinalement des lèvres mais ce que souhaitent tout le corps et la raison. C'est pourquoi il est dit que la prière est le travail du cœur quand le cœur est totalement en harmonie avec ce que prononcent les lèvres.

Ce n'est que lorsque, par le travail de son corps, l'homme ressent une réaction lui permettant de penser qu'aucun organe ne souhaite se débarrasser de l'égoïsme et encore moins en faire la demande au Créateur, c'est alors que la prière demandant le secours de l'exil spirituel sera formulée.

Tous les hommes sont égaux devant l'accomplissement physique des commandements du Créateur. Le petit enfant comme l'ignorant, le vieillard comme le sage, tous sont obligés de les accomplir. Il n'y a de différence que selon le sexe, l'heure et la saison, la situation familiale, etc., conditions qui sont déterminées d'En-haut. Il n'y a rien à ajouter, rien à enlever de ce qui est à accomplir ni de la façon de l'accomplir. La seule différence résidant dans le but de l'accomplissement.

L'homme doit aspirer à ce que la raison de ses actions soient en harmonie avec l'action purement mécanique visant à répondre au désir du Créateur. Tout comme il n'en comprend pas la raison, n'en voit pas les conséquences avantageuses immédiates, tout comme, en accomplissant les commandements, son corps agit comme un robot, comme l'a dit le Créateur, l'observation des commandements a pour seule raison "le souhait du Créateur".

Une telle approche s'appelle "pour le Créateur - li shema". Il est très facile de vérifier la raison pour laquelle l'homme accomplit les commandements: si la raison est "pour faire plaisir au Créateur", le corps ne peut pas faire un seul mouvement. Si la raison est un avantage personnel dans ce monde ou dans le monde futur, plus l'homme pense à la rétribution, plus il apparaît d'énergie à accomplir et à faire des ajouts de toutes sortes dans l'accomplissement des commandements.

D'après ce qui précède, il est clair que c'est l'intention , la "kavana" qui détermine la qualité des actes, et l'exagération quantitative n'a pas d'action sur la qualité de l'accomplissement des commandements.

Tout ce dont les peuples font l'objet se déroule avec, en toile de fond, l'action des forces spirituelles. Nous observons sur notre Terre au cours des siècles la relation de cause à effet des forces spirituelles. Est appelé sage celui qui sans attendre les conséquences des événements voit à l'avance les conséquences de tels ou tels événements et, par conséquent, peut en deviner et en empêcher les conséquences fâcheuses.

Comme notre monde est le siège des conséquences des actions des forces spirituelles, et que l'arène de leurs actions se situe au-dessus de nos sensations, seul le cabaliste peut d'avance, avant leur manifestation dans notre monde, voir et prévenir les événements. Mais tous ces événements étant envoyés pour notre réparation, sans laquelle nous ne pourrons pas atteindre le but de la création, personne, à part nous-mêmes, ne peut nous aider. Le Créateur nous envoie non pas des souffrances mais des moyens qui incitent à la réparation de notre progression.

Le cabaliste n'est pas un magicien qui fait des miracles. Son rôle parmi nous réside dans son aide globale pour élever le niveau de la création humaine jusqu'à la prise de conscience de la nécessité d'une réparation personnelle. Il aide aussi personnellement chacun de ceux qui le souhaitent.

L'homme n'a aucun pouvoir sur son cœur, qu'il soit fort, intelligent, doué. C'est pourquoi la seule chose qu'il peut faire, c'est d'accomplir machinalement le bien et de demander au Créateur de lui donner un autre cœur. (Par le terme "cœur" nous désignons tous les désirs de l'homme.). Tout ce qui est demandé à l'homme, c'est un fort désir et que ce désir soit unique et non pas un parmi d'autres. Parce que le désir ressenti par l'homme dans son cœur correspond justement à la prière. Et un désir fort et entier ne laisse pas de place pour les autres.

L'homme ne peut créer en lui un désir fort que s'il fait des efforts tous les jours, toutes les heures. En ayant bien conscience qu'il se trouve loin du but et qu'il n'étudie la Torah que dans le but d'en tirer un profit personnel, malgré les arguments possibles et imaginables du corps: la fatigue, la nécessité de s'accorder du temps pour, quand il le faudra, le Créateur agira de l'En-Haut tout comme lorsqu'Il l'a placé dans cette situation, que depuis qu'il a commencé à étudier la Cabale, c'est devenu pire, que les autres ont plus de chance que lui dans l'étude, et des accusations sans fin, des reproches et des appels à la raison, tant de la part du corps que de la part de la famille. C'est précisément en surmontant ces difficultés que l'homme construit en lui ses vrais désirs.

Surmonter ces désirs n'est possible que d'une seule façon, comme le conseille la Torah, il faut "tenir t?te à l'égoïsme", autrement dit, ne pas donner suite à leur manifestation ou bien adopter le raisonnement de grands hommes qui ont déjà pénétré les mondes spirituels et savent effectivement quelle doit être l'attitude de l'homme dans ce cas. Le fait que le cœur devienne plus égoïste est induit par la progression spirituelle, ce qui signifie qu'une petite partie de l'égoïsme peut être dévoilée à l'homme pour qu'il puisse demander avec plus de force au Créateur de lui faire faire un retour.

Le Créateur S'ouvre alors à l'homme à tel point que l'homme ressent la grandeur du Créateur et se soumet à Lui, il n'éprouve déjà plus de tentations corporelles, c'est ce que l'on appelle la transformation du "cœur de pierre" qui ne perçoit que ses propres sensations en "cœur de chair" qui est à l'écoute d'autrui.

Dans notre monde, l'homme progresse en utilisant ses organes de locomotion, ses jambes. Quand il a atteint son but, il utilise ses organes de préhension, les mains. Les organes spirituels sont opposés aux nôtres: l'homme progresse sur les degrés de l'échelle si, en pleine connaissance de cause, il n'utilise pas cet appui que représente le bon sens .

La création a pour but de faire le délice de l'homme. Pourquoi le Créateur nous fait-il emprunter un chemin si douloureux pour parvenir à ce but?

L'homme ayant été créé parfait par le Créateur, - le témoignage de cette perfection c'est la tranquillité car le mouvement est l'effet d'un manque, - la tentative d'obtenir quelque chose de désiré -, l'homme aime donc la quiétude et il est prêt à sacrifier sa tranquillité pour se débarrasser des souffrances dues à un manque important, par exemple, de nourriture, de chaleur, etc.

Les sensations de manque de ce qui lui est nécessaire poussent l'homme à agir. Plus la souffrance est grande du fait du manque de l'objet du désir, plus l'homme sera prompt à faire des efforts encore plus importants pour parvenir à ses fins.

C'est la raison pour laquelle, le Créateur lui fait ressentir des souffrances du fait du manque de spiritualité, ce qui oblige l'homme à faire des efforts. Après être parvenu à la spiritualité, le but de la création, il pourra se délecter. Ceux qui souhaitent progresser spirituellement ne ressentent pas les souffrances dues à leur égoïsme comme une punition, ils y voient la manifestation du désir du Créateur de les aider et au lieu d'une malédiction, une bénédiction.

Ce n'est qu'après avoir avancé dans sa progression spirituelle que l'homme comprendra cette délectation dont il souffrait de l'absence jusqu'alors. La différence entre le matériel et le spirituel réside dans le fait que le manque de jouissance matérielle fait souffrir l'homme. Le manque de jouissance spirituelle ne le fait pas souffrir. Pour amener l'homme à des jouissances spirituelles, le Créateur lui envoie des sensations de souffrance du fait de leur manque.

La jouissance matérielle ne fait pas parvenir l'homme à une sensation de plénitude infinie telle qu'elle est ressentie dans la plus petite jouissance spirituelle.

DÈs que l'homme commence à sentir le goût du spirituel, il y a aussitôt danger qu'il en perçoive les sensations de manière égoïste, autrement dit qu'il s'éloigne encore plus du spirituel. La raison en est que l'homme entreprend de s'intéresser au spirituel quand il en a ressenti une jouissance plus grande que celle qu'il avait expérimentée dans sa vie avilissante et inutile. Par conséquent, il ne juge pas utile d'acquérir la base de la spiritualité, la foi, car il sent bien que cela vaut la peine de s'intéresser au spirituel pour en tirer un avantage personnel.

Le Créateur n'agit ainsi qu'avec celui qui débute pour l'attirer et ensuite lui faire faire un retour. C'est comme une mère qui apprend à son enfant à marcher: plus il est capable d'avancer tout seul, plus elle s'éloigne de lui.

Chacun de nous croit qu'il sait mieux ce qu'il lui faut faire pour son intérêt. Ce sentiment vient du fait que du point de vue égoïste de son "moi" l'homme n'a la perception que de lui-même, et de personne d'autre que de lui-même. C'est pourquoi il se pense le plus sage car il ne connaît que ses désirs à chaque moment de la vie.

Le Créateur a mis en place l'organisation de notre monde en lui imposant les règles matérielles précises de la nature. Aucun subterfuge ne pourra tirer d'affaire l'homme qui bravera ces règles: celui qui se jette d'une montagne s'écrase, sans oxygène il étouffe, etc.

Le Créateur a fixé ces lois de manière claire et nette pour que nous comprenions que pour vivre, il faut faire des efforts et être prudent. Dans les mondes spirituels où l'homme ne sent pas les conséquences de ses actes et où les règles de survie lui sont inconnues, il doit comprendre au début du chemin que la loi la plus importante qui ne peut pas être contournée, tout comme les lois naturelles de notre monde, c'est la loi selon laquelle il est interdit de se fixer le plaisir comme objectif. Ce qui détermine le profit ou le préjudice dans la vie spirituelle, ce n'est pas la jouissance mais l'altruisme, le don.

La Torah représente la lumière qui émane du Créateur, elle est perçue par nous comme une immense jouissance. Comprendre la Torah ou le Créateur (ce qui est pareil puisque nous ne percevons pas le Créateur mais la lumière qui nous En parvient) est le but de la création.

La foi est une force qui permet de ressentir de l'assurance dans la possibilité d'accéder à la vie spirituelle, de sortir d'un état de mort spirituelle. La nécessité d'avoir la foi se ressent dans la mesure où l'homme sent qu'il est spirituellement mort.

La prière correspond aux efforts faits par l'homme, en premier lieu, aux efforts de son cœur pour percevoir le Créateur et Lui demander de lui donner de l'assurance pour accéder à une vie spirituelle authentique. Le travail, les efforts, la prière ne sont possibles que si l'homme a la sensation que le Créateur se dissimule à lui. La véritable prière de l'homme, c'est de demander au Créateur de lui donner les forces lui permettant d'aller à l'encontre de son égoïsme les yeux fermés, sans qu'Il se dévoile, c'est la plus grande rétribution puisque le degré de spiritualité est déterminé par le degré d'aspiration à donner de manière désintéressée. Quand l'homme éprouve de l'assurance dans ses forces altruistes, il peut commencer à se délecter pour faire plaisir au Créateur. Le désir du Créateur étant de faire plaisir à l'homme, la coïncidence des désirs les rapproche tous deux, et l'homme, outre le délice de recevoir la lumière du Créateur, éprouve le délice de se trouver au niveau du Créateur, du fait qu'il est uni à la perfection même. Cette délectation est le but de la création.

L'égoïsme étant naturel chez nous, il préside à tous les niveaux de la nature, aux niveaux moléculaire, hormonal, animal, jusqu'aux systèmes les plus complexes de notre raison et de notre subconscient, y compris nos désirs altruistes, et l'homme n'est pas du tout capable de lui résister de manière consciente.

C'est pourquoi celui qui souhaite se soustraire à l'empire de l'égoïsme est obligé dans tout ce qui est lié à sa progression spirituelle, d'agir contre les désirs de son corps et de sa raison, même s'il n'y voit aucun avantage personnel, sinon il ne pourra jamais aller au-delà des limites de notre monde.

Ce principe s'énonce ainsi en Cabale "il faut frapper le premier". Le Créateur aide l'homme en le dotant de sa nature, en faisant en sorte que son corps veuille travailler spirituellement, c'est ce qui s'appelle effectuer un retour, "techouva".

Le processus de transformation de l'égoïsme en altruisme se déroule ainsi: le désir de se délecter créé par le Créateur, l'égoïsme, le point noir au niveau duquel s'est produit le tsimtsoum, raison de l'éloignement de l'homme par rapport à la lumière, fait l'objet d'une réparation qui s'appelle écran (massakh ) à l'aide duquel l'égoïsme devient altruisme.

Comment un tel miracle peut-il se produire, nous ne sommes pas en mesure de le comprendre tant que nous ne l'expérimentons pas en nous car il nous semble tout à fait exclu de pouvoir changer une loi fondamentale de la nature pour que nous puissions soudain agir là où nous n'avons rien pu faire par nos efforts personnels.

L'homme découvre en fin de compte que son comportement ne s'est pas transformé et qu'il ne peut rien donner au Créateur car le Créateur est parfait et souhaite seulement remplir l'homme de perfection.

En échange de l'infini délice que lui procure le Créateur, l'homme ne peut rien donner sauf la pensée accompagnant la réalisation de ses actes qui est dédiée au plaisir du Créateur.

Cette pensée n'est pas dédiée au Créateur non plus mais est orientée vers bien de l'homme puisqu'elle lui permet d'éprouver des délices immenses sans honte du fait qu'il est parvenu à un degré de similitude avec le Créateur en devenant altruiste et donc qu'il peut recevoir sans fin caril reçoit, mais non pas à des fins personnelles.

L'homme est capable de s'obliger à faire quelque chose de physique mais il n'est pas en mesure de modifier ses désirs, de faire quelque chose qui ne serait pas orienté vers un plaisir personnel. Il n'est pas dit en vain que la prière sans intentions correctes est comme un corps sans âme (tfila bli kavana, ke gouf bli neshama) car les actes concernent le corps, et la pensée l'âme. Si l'homme n'a pas encore rectifié sa pensée (réparé son âme) qui le fait agir (fait agir son corps), l'acte est spirituellement mort.

Tous les éléments de ce monde renferment un aspect général et particulier. Dans ce monde, tout renferme du général et du particulier. La masse croyante est qualifiée de générale, de spirituellement non animée, domen--nefesh, du mot nefisha qui indique l'absence de mouvement spirituel personnel, le besoin intérieur qui induit le mouvement ne se faisant pas sentir. C'est pourquoi ses éléments ne connaissent pas une croissance individuelle, mais générale en conformité avec ce qui leur est dicté de l'En-haut. C'est pourquoi les masses sont toujours convaincues de leur bon droit et de leur perfection.

La croissance spirituelle - tsomeah - signifie que chaque élément fait l'objet d'une croissance, d'un mouvement personnel intérieur. Cet élément correspond à l'homme-adam selon la définition de la Torah "l'homme est comme un arbre dans un champ".

La croissance spirituelle impliquant obligatoirement l'aspiration au mouvement, et le mouvement ne pouvant être induit que par la sensation d'un manque, "l'homme" ressent en permanence les manques qui l'obligeront à rechercher le moyen de croître. S'il s'arrête à un niveau quelconque de sa progression spirituelle, il est abaissé pour l'inciter à avancer. S'il s'élève à nouveau, il se retrouve alors non pas au niveau précédent mais à un autre bien supérieur.

C'est ainsi que l'homme ou bien s'élève ou bien tombe, il ne peut pas rester sur place car c'est un état que "l'homme" ne connaît pas. Seuls ceux qui font partie de la masse restent sur place, ne peuvent pas tomber de leur niveau, n'ont jamais la sensation de chute.

Si on divise mentalement l'espace par une ligne horizontale, le monde spirituel se situera au-dessus de la ligne et le monde égoïste en dessous.

Au-dessus de cette ligne peut se trouver celui qui préfère agir nonobstant sa raison, même s'il a la possibilité de tout connaître et tout voir, il souhaite croire, les yeux fermés, (emprunter le chemin de la foi - " emouna lemala mi daat" ) et aspirer au spirituel (altruisme au lieu de l'égoïsme).

Les degrés spirituels sont définis par le degré d'altruisme. En fonction de ses attributs et de ses qualités, l'homme se trouve sur tel ou tel degré spirituel auquel correspondent ses attributs.

Ressentir le Créateur est possible quand on est au-dessus de la ligne, et plus on est au-dessus de la ligne, plus la perception est forte. La notion de "au-dessus" et "au-dessous" est déterminée par l'écran qui reflète la délectation égoïste directe par l'homme de la lumière divine. La lumière au-dessus de la ligne s'appelle la Torah.

L'écran, la ligne qui sépare notre monde des mondes spirituels, est appelé "massah". Ceux qui traversent cet écran ne retombent plus au niveau de notre monde. Sous la ligne se situe l'empire de l'égoïsme, au-dessus de la ligne, l'empire de l'altruisme, mais, parallèles aux degrés spirituels altruistes, à partir du niveau de la ligne en allant vers le haut se trouvent également des degrés impurs: olamot Assia, Yetsira, Bria de Tuma, chacun correspondant à 10 degrés-sefirot, au total 30.

A partir de la ligne décrite précédemment et en allant vers le haut se situe tout le monde de Assia jusqu'à la moitié du monde de "Yetsira" parallèlement aux degrés purs et impurs, et ce monde de Assia englobe également les principaux désirs impurs, "mador klipot". Au-dessus des trois mondes purs (chacun correspondant à 10 sefirot, au total 30) se trouve le monde de Atsilout qui est constitué également de 10 degrés-sefirot.

"L'Atsilout" correspond au monde où l'on ressent totalement le Créateur et où l'on est uni à Lui. L'homme s'élève constamment jusqu'au monde de Atsilout en acquérant des attributs propres à l'altruisme. Après avoir atteint le monde de Atsilout, autrement dit après avoir acquis tous les attributs se caractérisant par le "donner sans réserve", l'homme qui est sur le degré le plus bas du monde de Atsilout commence à avoir la capacité de recevoir dans une intention orientée vers le Créateur. Si jusqu'alors il avait acquis des attributs supplémentaires d'altruisme, il commence désormais à réparer l'essence même de son être (et non à le détruire). Au moyen de ses nouveaux attributs d'altruisme, il n'annihile pas son désir de se délecter, il rectifie (répare) le but de l'intention qui le guide.

En transformant progressivement son égoïsme en altruisme, l'homme s'élève d'autant jusqu'à ce qu'il reçoive tout ce qu'il doit recevoir selon la racine de son âme (shoresh neshama) qui est à l'origine une partie du dernier degré (malkhout) du monde de Atsilout, mais qui, du fait de la transformation opérée, s'élève jusqu'à l'union totale avec le Créateur et reçoit ainsi 620 fois plus qu'en s'incarnant dans un corps humain.

 

 

 

 

Traduction : Nelly Baron ©